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L’Humanité

Face aux licenciements, mettre en débat le droit de réquisition

Vous avez pris la parole, gardez-la !

Par Patrice Voir, responsable de la fédération de l’Isère du PCF, conseiller régional.

Fonds publics : doit-on pouvoir exiger le remboursement ?

Hewlett-Packard a affiché l’objectif de réduire de 1,6 milliard de dollars la masse salariale, de 300 millions de dollars les avantages sociaux malgré la multiplication par cinq de ses bénéfices.

La direction de HP a décidé de supprimer 10 % de ses effectifs dans le monde dont 5 969 en Europe (15 %) et 1 240 en France (26 % des effectifs).

Bien que HP ne parle pas de fermeture de site, cette baisse des effectifs pourrait poser la question de la viabilité de HP France. D’autant que, entre 2002 et 2005, après le rachat de Compaq, HP a déjà supprimé 26 200 emplois dans le monde dont plus de 2 000 en France.

Après la décision de supprimer 14 500 emplois, la semaine dernière, la direction de Hewlett-Packard annonce le rachat pour 425 millions de dollars de Peregrine Systems.

Comme pour Neslé, il n’y a aucune justification industrielle et économique à ses suppressions d’emplois. Cette annonce révèle une réalité systématique du libéralisme, les licenciements de Hewlett-Packard financent l’extension du groupe et l’augmentation des dividendes de ses actionnaires.

C’est d’autant plus inadmissible que HP a accumulé une dette sociale, technologique et territoriale en France. Il a bénéficié massivement de fonds publics (1,8 million d’euros rien que pour les collectivités locales de l’Isère), il a écrémé les ressources humaines grâce à l’accès privilégié à des pôles universitaires d’excellence, il a joui d’une main-d’oeuvre hautement qualifiée et d’un savoir-faire de niveau mondial, il a disposé d’infrastructures et de services publics de grande qualité.

La mobilisation des salariés atteinte le 16 septembre était inédite chez cette catégorie (ingénieurs, cadres) peu habituée aux manifestations de rue. Bien sûr, l’émotion suscitée rassemble toutes les forces. Tout l’éventail politique des élus locaux défilait avec les salariés de Hewlett-Packard, même si bon nombre d’entre eux avaient défendu ce libéralisme durant la campagne référendaire. À tel point que les salariés de ST Microélectronic, eux aussi confrontés à une annonce de suppression d’emplois, ont écrit à Chirac qu’ils espéraient une mobilisation de l’État aussi forte pour eux.

Nous pouvons mesurer l’écho de nos propositions et l’urgence d’arracher de réels droits nouveaux d’intervention des salariés. Ainsi quand nous disons que toutes les collectivités locales, les régions, l’État, l’Union européenne sont concernés et ne peuvent pas laisser faire, on a pu entendre André Vallini, président du conseil général de l’Isère, et Dominique de Villepin, premier ministre, annoncer respectivement leur intention d’exiger le remboursement des aides publiques versées au groupe HP. Mais il ne tient qu’au gouvernement de revenir sur l’abrogation des lois Hue et de modernisation sociale. Jacques Chirac s’est retourné vers la Commission européenne (laquelle avait autorisé le rachat de Compac par HP) et du coup le président Barosso a rappelé au président de la République quels étaient les principes d’une « concurrence libre et non faussée ».

Notre proposition d’un moratoire sur les suppressions d’emplois et d’une table ronde réunissant les dirigeants du groupe, les syndicalistes, les pouvoirs publics et les élus afin d’étudier des stratégies de développement alternatives aux suppressions d’emplois peut devenir un objectif de lutte immédiat.

Marie-George Buffet qui, le 16 septembre était venue rencontrer les salariés et l’intersyndicale, a écrit à Chirac pour lui dire combien « il est choquant que l’État laisse ainsi une entreprise, largement bénéficiaire, licencier massivement pour accroître encore les dividendes de ses actionnaires » et a demandé que l’État prenne des mesures immédiates à l’encontre de Hewlett-Packard pour empêcher les licenciements de salariés.

De même que la demande d’une enquête parlementaire sur l’attitude des multinationales est justifiée.

Mais ne nous faut-il pas pousser certaines pistes pour que notre proposition d’une sécurité d’emploi et de formation ne reste pas dans le domaine des slogans, par exemple celle de la mise en place de conseils des territoires. Les cas de Hewlett-Packard et celui de Nestlé ne posent-il pas la question d’un droit d’appropriation sociale, de préemption ou de réquisition en matière d’entreprise. Il me semble que, si nous ne voulons pas à notre corps défendant nourrir le fatalisme, ce sont ces questions que nous devons mettre en débat publiquement dans les forums du PCF.


Le : 27.10.2005
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