Jeudi soir à Vitry, deux cents personnes ont débattu de l’avenir des services publics et de l’alternative à construire, en présence de représentants des forces politiques, syndicales et associatives du département,
« Moi, j’ai envie d’une vraie alternative. Pas d’une simple alternance ! » Si l’exigence de changement clairement affichée par le maire de Vitry semble faire l’unanimité parmi les participants du forum du Val-de-Marne, sa réalisation, par contre, ne va pas de soi. La preuve ? D’abord l’absence d’une partie de la gauche qui comme les Verts ont préféré décliner l’invitation ou comme le Parti socialiste qui s’est désisté au dernier moment. Mais les difficultés existent aussi au sein même de la gauche qui a permis la victoire du NON le 29 mai dernier. Ainsi, pour le représentant de la LCR, « la construction d’une alternative doit permettre un véritable changement anticapitaliste. Un objectif aujourd’hui incompatible avec les orientations du PS ». Une position bien sûr contestée par le représentant du PRS qui considère, quant à lui, « qu’envisager un rassemblement antilibéral sans le PS serait se planter ! Alors, comment faire ? Ces obstacles condamnent-ils toute démarche de construction commune ? Le seul choix possible se limiterait-il à l’alignement sur le social -libéralisme ou la victoire inéluctable de la droite ? Ce n’est en tout cas pas la problématique dans laquelle se place Laurence Cohen qui, pour le PCF, en appelle à « l’intervention populaire ». Une dynamique qui, dans son esprit - et à l’image de la campagne référendaire -, doit permettre aux citoyens d’être partie prenante de tous les débats et de confronter leurs exigences avec l’ensemble des forces progressistes, sans exclusive.
C’est cette démarche que les communistes du Val-de-Marne ont commencé à initier avec ce forum départemental consacré à la question des services publics et de l’alternative. Une expérience qui montre que même si en un soir on ne fait pas le tour de toutes les questions, on en ressort cependant avec un certain nombre d’exigences et de propositions précises.
L’exigence de ruptures
Ainsi, pour tout le monde, une politique de gauche doit s’inscrire en rupture avec les orientations mises en œuvre ces dernières années. Y compris du temps de la gauche plurielle. Car ici on n’a pas oublié que les privatisations de France Télécom et d’Air France ont commencé avec la gauche au pouvoir. En même temps on ne renvoie pas gauche et droite dos à dos. On mesure l’ampleur et la gravité des coups portés aux services publics sous les gouvernements Raffarin/Villepin. On évoque les centaines d’hôpitaux menacés, le scandale des privatisations d’EDF, de La Poste, de la recherche. Un représentant de la FCPE s’insurge contre le retour en arrière que constitue l’apprentissage à quatorze ans. Chacun mesure qu’en la matière, aucun secteur n’est épargné. Même les collectivités territoriales sont touchées, rappelle Christian Favier, le président communiste du département. Et les représentants de la droite n’entendent pas en rester là puisque, selon Jean-Claude Lefort, la directive Bolkestein devrait être prochainement soumise au vote du Parlement européen. Et le député communiste d’ajouter : « Quant à l’accord général sur le commerce et les services s’il était adopté il entraînerait la privatisation de tous les services publics et cela de façon irréversible. »
Du coup on évoque les résistances en cours et celles à construire : les pétitions contre la fermeture des bureaux de Poste, l’action du comité de défense du service public d’EDF. Un agent des impôts fait part de la lutte qu’il mène avec ses collègues contre les suppressions d’emplois... Mais chacun sent bien que si l’action pour défendre les services publics est essentielle, elle ne peut suffire à changer radicalement la situation.
Moderniser, démocratiser, étendre
Pour la plupart des intervenants, les défis actuels de la société appellent à rénover, moderniser et à redéfinir les missions des services publics. Pour beaucoup leur champ doit même être étendu. C’est ainsi qu’une intervenante rêve d’une « EDF qui distribue l’électricité à tout le monde, même aux plus défavorisés, des hôpitaux qui soignent sans discrimination et d’une ANPE qui permette à tous de se réinsérer par l’emploi. Pour cela des propositions sont avancées. Elles font parfois l’objet de débats. Ainsi, si tout le monde est convaincu de revenir sur les privatisations, on s’interroge sur la façon de le faire, sur les formes de propriété et le contenu de ces renationalisations. Par contre l’idée d’un grand service public de l’eau semble faire l’unanimité et devrait même faire l’objet d’un prochain forum. On revendique aussi la création d’un service public du médicament et de la recherche pharmaceutique, du logement, du traitement des déchets... L’idée d’un grand pôle bancaire public est aussi avancée car « il y a besoin d’une maîtrise publique du crédit pour relancer une grande politique industrielle ».
Pour Laurence Cohen à qui revenait le mot de la fin, le débat est loin d’être achevé. Il va se poursuivre, en lien avec les luttes à construire, sur la question des services publics et sur toutes les autres, qu’elles touchent au contenu du projet ou à la nature du rassemblement à construire. C’est dans cet esprit qu’elle propose d’engager le débat aussi sur l’atout que pourrait constituer, pour le rassemblement, une candidature communiste en 2007.
Rendez-vous est pris pour une trentaine de forums dans le département.
Patrice Falguier pour "Communistes"