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Parti communiste français

Ensemble, ayons l’ambition de bouleverser l’ordre des choses.

Marie-George Buffet, forum national de Villepinte le 26 novembre 2005

Marie-George Buffet, forum national de Villepinte le 26 novembre 2005

"Il n’y a pas à prévoir des calendriers, il y a à travailler dès maintenant."

Chers amis, chers camarades,

Notre pays traverse une crise grave, qui couve depuis longtemps déjà. Cette crise, ces émeutes qui se sont déroulées dans les quartiers populaires en ont été une manifestation aiguë. Non il ne s’agit pas d’un problème de “banlieues” mais d’une crise de toute la société. C’est aussi cela que disait à sa terrible façon, le 21 avril 2002. Depuis, la droite a mené une politique brutale, elle s’en est pris à tout ce qui freinait la libre domination du capitalisme mondialisé. Elle s’en est pris aux hommes et aux femmes eux-mêmes et elles-mêmes, bafouant leur dignité individuelle et collective. Et pourtant, face à cette politique violente imposant une société d’injustices et d’inégalités en tous domaines, des résistances se sont levées à maintes reprises. La colère des salariés de ce pays s’est maintes fois exprimée, s’est confronté à des murs et réprimée maintes fois. Nous sommes face à un gouvernement populiste, autoritaire et répressif, qui se repaît dans l’état d’urgence et qui , avec toute la droite se déchaînent dès que des hommes et des femmes expriment le moindre signe de désaccord. Que n’entend-on pas contre ceux et celles qui se lèvent, qui se mettent en grève ? Avec le renfort des grands médias, qui sont repartis comme avant le 29 mai, le pouvoir veut leur briser l’échine.

La droite qu’elle ait pour porte drapeau Chirac, Raffarin, Villepin ou Sarkozy a veut tuer l’espoir. Le vote du 29 mai, par sa force anti-libérale, dernier lui a fait mal, lui a fait peur. La seule conclusion qu’elle en a tiré, c’est qu’elle devait aller plus vite ,plus loin et plus fort dans la régression de civilisation qu’elle nous impose et dans le matraquage de toutes les aspirations populaires.

Face à cela, oui, la gauche a une grande responsabilité. La gauche doit être à la hauteur. La gauche doit proposer une alternative.

Elle a beaucoup déçu, elle a cédé du terrain aux logiques libérales, elle a manqué trop souvent de courage. Mesurons aujourd’hui l’ampleur du défi qui est devant nous. Voulons-nous oui ou non, en finir durablement avec cette droite qui fait mal ? Voulons-nous oui ou non mettre en oeuvre une politique de transformation social apte à changer vraiment la vie ? Car enfin que reste-t-il, d’alternance en alternance de ce qui a pu être édifié de positif depuis vingt ans ? Et même depuis soixante ? Pourtant, j’entends ça et là, sonner de nouveau le cor du renoncement.

A quoi servirait une énième alternance sans rupture avec les politiques que nous avons connues ? Méfions-nous car si telle devait être la proposition de la gauche, d’autres discours de rupture, ceux que l’on entend à droite pourraient bien emporter le morceau pour le plus grand drame de notre peuple. Faudrait-il une nouvelle fois mettre le boisseau sur notre conviction d’une société de fraternité ? Faudrait-il une fois de plus rejeter les attentes populaires ? Non ! Il y a besoin d’ambition, de courage, de volonté ! C’est ce qui ressort de tous les forums auxquels j’ai participé, c’est ce qui ressort des comptes rendus des ateliers et de nombreuses interventions cet après-midi !

Cette ambition, elle ne pourra voir le jour, elle ne pourra entrer dans la vie qu’avec l’intervention populaire. Le peuple, dont la gauche s’est coupée au fil des ans. Rien ne se fera sans que le plus grand nombre d’hommes et de femmes, de citoyennes et de citoyens s’emparent des enjeux politiques, et bâtissent la gauche dont ils ont besoin. Rien ne se fera sans une dynamique populaire plus forte encore que celle qui a balayé la Constitution libérale de l’Europe qui nous était proposée. C’est pour cela que le moment que nous vivons aujourd’hui, avec toute la dynamique qui l’accompagne, est crucial. Cette dynamique populaire, ce mouvement profond, nous devons lui permettre de grandir. C’est l’objet des forums qui se tiennent partout en France. Il y a un paradoxe saisissant entre le bouillonnement de débat et d’aspirations qui monte dans la société et les blocages, les divisions qui dévorent la gauche. Il serait fou et méprisant à tous égards de penser qu’un programme établi dans des cercles fermés, soumis à amendements et approbation de forces considérées comme partenaires d’appoint, serait la voix juste à emprunter, permettant de rassembler notre peuple. Je comprends, les communistes le font eux-mêmes, que chaque force travaille sur des propositions alternative, c’est leur rôle, mais pour que ces propositions prennent toute leur pertinence, il faut que leur application s’appuie sur un rapport de force suffisant. Une gauche populaire, d’une conscience active et militante. Ne pensons pas que nous détenons des vérités révélés et que nous sommes ex-nihilo, les porteurs du salut. Pensons plutôt au rôle qui doit être celui des organisations politiques pour que l’émancipation humaine soit le fait des individus eux-mêmes. De par le monde, la contestation du libéralisme se fait plus forte, sous des formes très diverses, des hommes et des femmes se réunissent pour imaginer d’autres possibles. Là est le seul chemin possible pour bâtir un avenir à notre monde. Nous vous y tiendrons.

Ici, ce matin, nous avons débattu tous ensemble de propositions concrètes. Elles sont caractérisées par leur contenu anti-libéral et elles se situent en contre de la logique capitaliste. je ne prendrais que quelques exemples comme la nécessité, face à l’exploitation d’écrire de nouvelles pages du code du travail pour changer la conception du travail. Comme l’exigence d’assurer un haut-niveau de protection sociale, en ouvrant immédiatement le droit à une vraie retraite à 60 ans avec 37 annuités et demi de travail, en allant vers la généralisation de la prise en charge à 100% des soins. Cela appelle la taxation des actifs financiers. En plaçant la barre haut avec la mise en place d’une sécurité d’emploi et de formation pour éradiquer le chômage et la précarité. Oui, il faut garantir l’égalité de tous et toutes devant les droits fondamentaux et gérer de façon démocratique et durable les biens communs de l’humanité. Oui, il faut accroître les droits et les libertés individuelles et collectives, donner les moyens à la lutte contre toutes les discriminations. Oui, il faut donner à l’école les moyens d’assurer un suivi personnalisé, donner sa chance à chacune et chacun. Nous avons débattu de tout cela aujourd’hui. Ce débat a donné à voir l’étendue de ce qui est nécessaire et donc exigible. Mais je voudrais simplement dire une chose. Si l’on ne dit pas comment on va faire pour réaliser toutes ces propositions que l’on formule, on n’a rien dit. Car une des raisons des échecs de la gauche, ces dernières années, c’est son refus de s’attaquer aux barrages financiers, démocratiques et internationaux qui empêchent d’aller de l’avant. Cela suppose des renversements et des batailles de très grande ampleur.

Sur le plan des moyens financiers, comment augmenter le budget de l’école et de la santé, développer les services publics sans aller chercher l’argent là où il est ? Il faut une réforme radicale de la fiscalité, il faut des mesures salariales importantes, il faut réorienter totalement les politiques de crédit et les politiques monétaires, il faut se doter d’instruments d’action efficaces comme une Banque Centrale Européenne enfin domestiquée et un pôle bancaire public.

Sur le plan démocratique, comment imaginer opérer les changements fondamentaux qui sont nécessaires sans que les citoyennes et les citoyens eux-mêmes soient acteurs et partie prenante des rapports de force sociaux ? Cela appelle une VIème République qui démocratise profondément nos institutions, donnant de vrais pouvoirs aux salariés dans les entreprises. Il faut considérer qu’ils sont aptes, légitimes à s’ingérer, comme les élu-e-s dans la gestion des entreprises.

Sur le plan international, comment penser effectivement changer durablement les choses sans modifier l’ordre mondial ? Il faut donc mener avec détermination les batailles européennes pour faire prévaloir d’autres choix. Cela n’a jamais été fait ! Il faut donc réformer totalement le FMI et l’OMC, qui sont des instruments du capitalisme mondialisé !

Cela veut dire qu’il faut trouver les moyens d’agir contre le dumping social et pour un processus d’élévation globale des droits. Cela veut dire qu’il faut remplacer le règne de la libre concurrence par celui de la libre coopération ! Dans les mois qui viennent, des batailles se préparent : ils veulent nous repasser les plats de la directive Bolkestein, de la directive qui augmente le temps de travail, de la libéralisation du rail ! Comme si cela avait pu échapper aux cheminots en grève !

Le débat populaire est bien entamé désormais. Il a déjà bougé toute la gauche. Toute la gauche était en échec ces dernières années, et toute la gauche est interpellée pour construire un autre avenir. Chacune des forces politiques qui en est partie prenante a des propositions et des préoccupations. On a vu aujourd’hui que la confrontation politique ait vraiment lieu, et qu’elle se déroule au cœur de notre peuple est la meilleur des choses qui puisse arriver à la gauche. Des convergences se créent sur cet objectif et je ne peux que m’en réjouir. Nous ne perdons pas de vue notre objectif. celui de construire une union, une majorité populaire sur un programme anti-libéral !

Depuis quelques semaines, des milliers et des milliers de personnes se retrouvent dans les forums parce qu’ils veulent que les choses changent, parce qu’ils veulent mettre la droite dehors durablement. Dans notre monde une idée politique, très politique monte et fait son chemin : « ça ne peut plus durer ». Notre peuple veut autre chose. Il l’a dit de toutes les façons possibles ces vingt dernières années. Il l’a dit lors du référendum sur la Constitution européenne. Fixons-nous l’ambition de construire une majorité politique pour porter cette aspiration et lui donner force de loi.

Créons les conditions d’un mouvement populaire et citoyen qui porte cet objectif dans toute la société. Bâtissons dans la vie un projet antilibéral et anticapitaliste, le projet d’une société plus humaine, de liberté, d’égalité et de fraternité. Parce que je veux que la gauche enfin réussisse, je voudrais lancer aujourd’hui un appel. Hommes et femmes de ce pays, ne baissez pas la tête, ne jetez pas vos espoirs à la corbeille.

Nous vous proposons de bâtir ensemble une politique qui réponde à vos attentes. Ensemble, ayons l’ambition de bouleverser l’ordre des choses. La gauche a besoin de vous, la gauche ne doit pas se faire sans vous !


Le : 28.11.2005
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