Les Verts

Pour une Sixième République

Groupe de travail programme des Verts

" L’État, ce n’est plus un président de la République avec une ou plusieurs Chambres de députés. Ce n’est plus un dictateur avec des ministres tout-puissants. C’est une organisation d’une complexité grandissante et qui met en œuvre la somme des techniques dont peut disposer le monde moderne. " Jacques Ellul

La question de l’État et, au-delà, des institutions publiques, est la grande impensée depuis la révolution keynésienne. L’idée de " moins d’État ", naguère apanage des libertaires, est ainsi aujourd’hui principalement portée par les ultra-libéraux, qui se sont pour certains choisi le nom de " libertariens " dans les pays anglo-saxons.

À l’opposé, pour les courants progressistes, plus l’intervention de l’État est forte, plus les principes d’égalité, de justice sociale, plus les objectifs de développement économique, humain sont assurés.

De tradition bonapartiste, une grande partie des courants conservateurs français partage également cette conviction, qui n’a guère été ébranlée par l’adhésion éclair de quelques dirigeants gaullistes aux thèses thatchériennes.

Ainsi, l’ensemble de la classe politique française traditionnelle voit dans l’action de l’État une action par essence positive.

Pour les Verts, l’État doit représenter l’ensemble des outils dont se dote la communauté des citoyens dans un objectif de bien être commun. Au-delà même des fonctions dites "régaliennes", et qui sont liées au maintien de l’ordre (police, armée, justice et trésor public pour financer le tout), c’est l’ensemble des fonctions publiques qui devront être réévaluées, dans un triple objectif de subsidiarité, de solidarité, de lutte contre les phénomènes de technostructure et de politiques publiques tendant vers le développement durable. En ce sens, l’État ne doit pas être neutre, mais un acteur essentiel d’une politique d’équilibre entre les exigences démocratiques, sociales et environnementales.

C’est à partir de ce principe que doivent être réformées les institutions de l’État.

L’ambition réformatrice de la gauche plurielle a été entravée par la résistance du Sénat dominé par la droite, sans perspective d’alternance en raison de son mode d’élection.

C’est pourquoi les Verts préconisent l’organisation d’un référendum institutionnel afin de parachever le travail entrepris pour démocratiser la société.

Des institutions plus légitimes grâce à une juste représentation de la société

Il s’agit de consacrer enfin le droit de vote et l’éligibilité de l’ensemble des résidents étrangers aux élections locales sur le mode de la proposition de loi des députés Verts votée le 3 mai 2000 par la gauche plurielle et refusée par le Sénat.

Lutter contre le cumul : deux mandats maximum

Le cumul des mandats est une spécificité française qui nuit aussi bien à l’exercice des mandats par leur titulaire, qu’à la capacité des partis politiques à concourir à l’exercice de la démocratie. Le mandat unique est la meilleure solution à terme. Le cumul de deux mandats nous paraît être la limite acceptable dans l’immédiat. Les députés devenus ministres doivent pouvoir retrouver leur siège à l’Assemblée lorsqu’ils quittent le gouvernement, la règle actuelle, qui s’y oppose, étant liée à la volonté de De Gaulle d’émanciper le gouvernement de l’influence parlementaire, découlait de sa conception " bonapartiste " de la Ve République.

Limiter le renouvellement des mandats

La limitation du nombre de mandats successifs exercés par le même titulaire est une condition d’un fonctionnement sain de la démocratie, à tous les niveaux de représentation. L’absence de règles dans ce domaine constitue sans doute l’une des raisons du vieillissement inquiétant de la représentation nationale constaté depuis le début des années quatre-vingt. En 1982, l’âge moyen du représentant syndical ou politique était de 45 ans, il est de 59 ans aujourd’hui. C’est pourquoi nous proposons de limiter à deux renouvellements, soit trois mandats, l’ensemble des mandats électifs.

Limiter à cinq ans la durée de tous les mandats électifs. Cette proposition couplée avec l’interdiction de dépasser 3 mandats successifs empêcherait ainsi d’exercer plus de quinze années consécutives le même mandat.

De nouveaux modes de scrutin pour que le Parlement représente mieux la société

Le scrutin majoritaire actuel n’assure pas une représentation équitable des forces politiques en présence dans la société. Nous prônons pour l’Assemblée nationale l’introduction du mode de scrutin dit " Weill-Raynal ", proche de celui qui est pratiqué en Allemagne, qui permet de combiner les avantages d’un scrutin de circonscription et ceux du scrutin majoritaire intégral. Nous proposons que le Sénat soit élu au scrutin proportionnel de liste, dans le cadre régional.

Réformer en profondeur les institutions de la Cinquième République

o Rééquilibrer les relations entre le Parlement et l’exécutif

Nos institutions ne constituent plus un cadre efficace et démocratique de fonctionnement du pays. La cohabitation, devenue habituelle, a entraîné la paralysie de l’État et contribué au discrédit de la politique. Pour en finir avec l’absurde coexistence d’un Premier ministre et d’un président de la République ayant l’un et l’autre les moyens de se neutraliser, les pouvoirs et le statut du président de la République doivent être profondément modifiés, pour permettre au Premier ministre de jouer véritablement son rôle de chef de l’action gouvernementale, sous le contrôle du Parlement. Le président de la République, qui n’est pas soumis au contrôle du Parlement, doit être un garant de l’équilibre constitutionnel et non un acteur quotidien de l’action gouvernementale. Les pouvoirs et le statut du président de la République doivent être profondément modifiés :

-  Suppression de l’article 16 de la Constitution, vestige du passé et de la conception bonapartiste du pouvoir présidentiel.

-  Suppression de l’article 9 de la Constitution, qui prévoit que le président de la République préside les séances du Conseil des ministres. Modification de l’article 13 de la Constitution pour transférer au Premier ministre, seul responsable de l’action de l’administration devant le Parlement, le pouvoir de nomination des hauts fonctionnaires.

-  Suppression du "domaine réservé" du président de la République et des réseaux parallèles (la Françafrique). Remplacement du droit de grâce par le droit de réouverture d’une nouvelle procédure judiciaire.

-  Modification du statut pénal du président de la République (article 68 de la Constitution) pour limiter le privilège de juridiction dont il bénéficie aux seuls actes accomplis par le Président dans l’exercice de ses fonctions.

o Améliorer le processus d’élaboration de la loi.

o Augmenter la part de l’ordre du jour consacrée aux textes et aux débats d’initiative parlementaire.

o Porter à dix le nombre de commissions permanentes de l’Assemblée nationale et donner un plus grand rôle au travail qu’elles accomplissent.

o Ouvrir le débat en séance publique sur la base du texte voté en commission ; assurer la publicité des débats des commissions. Supprimer les restrictions apportées au droit d’amendement des parlementaires par les articles 40 et 49-3 de la Constitution.

o Renforcer le contrôle parlementaire de l’exécutif.

Le Premier ministre ne recevra la plénitude de ses pouvoirs non par le décret de nomination du président de la République, mais par un vote de confiance de l’Assemblée nationale à l’installation de son gouvernement. Les corps de contrôle actuellement placés sous l’autorité du gou- vernement (Inspection générale des finances, Inspection générale de l’Administration, Cour des comptes, Inspection générale des Affaires sociales), ainsi que les autorités administratives indépendantes qui ont proliféré seront mises à disposition de l’Assemblée nationale.

o Transformer le Conseil constitutionnel en une véritable Cour constitutionnelle. Ses membres seraient élus pour neuf ans, avec un renouvellement par tiers, par les seuls parlementaires élus au suffrage universel direct, à une forte majorité qualifiée, ce qui garantirait leur neutralité. La saisine doit être élargie à l’ensemble des citoyens. Elle pourrait notamment être mise en œuvre par la voie d’une exception d’inconstitutionnalité, invoquée à l’occasion d’un contentieux par un justiciable, devant une quelconque juridiction, qui aurait alors la possibilité de saisir la Cour constitutionnelle du problème soulevé.

Encourager l’expression de la démocratie directe

Le referendum d’initiative populaire doit être encouragé à tous les niveaux de collectivités publiques. Les conditions de son organisation seront précisées de façon à ce que les questions soumises au suffrage des citoyens correspondent effectivement à une préoccupation de la population, et des seuils de participation en garantiront la représentativité. Couplé à la possibilité de saisine directe du Conseil constitutionnel, le referendum d’initiative populaire permettra une participation plus effective des citoyens à l’élaboration de la loi commune. Enfin, un droit d’initiative législative devrait être conféré aux citoyens : toute proposition de loi contresignée par 500 000 citoyens devrait être automatiquement inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

Recréer les conditions de la démocratie locale

Tout le monde est d’accord sur le constat : l’organisation administrative de notre pays ne correspond plus à la réalité de la vie quotidienne de nos concitoyens, et aux besoins de services qu’elle engendre. L’aire géographique dans laquelle nous évoluons pour travailler, nous former, assurer l’éducation de nos enfants, faire nos courses, dans laquelle est assuré notre approvisionnement en eau potable, le traitement de nos déchets, n’a en général pas grand-chose à voir avec les limites des 36 600 communes françaises. La France a commencé à se réorganiser en pays et en communautés d’agglomérations. L’importance des compétences qu’ils exercent justifie que les instances délibératives et exécutives de ces regroupement intercommunaux soient élues au suffrage universel. Ce sera la seule façon de permettre que les citoyens se prononcent réellement sur les projets de territoire, les prélèvements fiscaux opérés, les actions conduites.

Le mode de scrutin doit être harmonisé pour l’ensemble des élections territoriales, pour permettre une meilleure compréhension des mécanismes par les citoyens. Nous proposons que l’ensemble de ces élections aient lieu région par région, à une date différente, de façon à rompre avec un caractère par trop national donné aujourd’hui aux élections locales.

La démocratie, c’est aussi le respect des minorités. Un statut de l’opposition applicable dans l’ensemble des collectivités territoriales doit être adopté, de même que dans les assemblées parlementaires. Dans les collectivités territoriales, à l’exception des plus petites communes, nous proposons que la présidence de l’Assemblée et la présidence de l’exécutif soient assurées par deux personnes différentes.

Démocratiser, c’est aussi respecter la diversité culturelle de nos territoires. Le projet de loi portant ratification de la charte des langues régionales dot faire partie des réformes constitutionnelles soumises au référendum.

Enfin, la fiscalité locale devra être réformée pour la rendre plus juste, compréhensible par les redevables, et dans un sens qui permette aux citoyens de comprendre qui fixe les niveaux des contributions qui leur sont demandées et pour quel usage, conformément aux propositions qui figurent dans ce projet.