S’agit-il d’une crise comme les autres ou de la rupture d’une trajectoire perverse vieille de cinquante ans ? La réponse à cette question dépend de la capacité des Européens à créer un espace public européen. Et aussi de la qualité des analyses critiques, des propositions alternatives et de leur traduction en luttes et victoires sociales, environnementales et politiques.
Les Européens vivent-ils la période actuelle comme un commencement où est progressivement scellée la rencontre entre une communauté qui s’invente et une idée - la justice - qui lui donne un sens ?
L’acte constituant manqué
Le vote du 29 mai en France a fait l’objet d’enquêtes à la sortie des urnes et d’enquêtes ultérieures notamment auprès des abstentionnistes qui permettent d’en cerner le sens [1].
La campagne et le vote marquent un regain modeste d’intérêt (48% de personnes sont intéressées par la campagne contre 45% pour Maastricht, soit 900000 personnes en plus) qui touche aussi les classes populaires, mais l’intérêt reste beaucoup plus grand dans les catégories privilégiées (59% des cadres contre 48% des ouvriers). Le nombre des abstentionnistes est faible (30,6%) à l’égal de Maastricht (30,3%). Seuls 17% des abstentionnistes disent qu’ils ne sont pas intéressés par la politique.
Le vote NON manifeste une fois encore la très profonde et ancienne crise de la représentation politique et médiatique : la quasi-totalité des partis politiques et des médias étaient favorables au OUI.
Comme motif du vote, l’Europe est en hausse (60% contre 53%, soit plus de 2 millions de personnes de plus que pour Maastricht), mais l’écart reste très grand entre les privilégiés, très motivés par l’Europe (70%), et les classes populaires qui motivent leur vote à la fois par l’Europe (49%) et les questions nationales (45%).
Le NON représente 54,67% des votants ; le NON de gauche [2] 31,3% ; le NON de droite et d’extrême droite représente 23,7%. Votent massivement NON : les chômeurs (76%), les ouvriers (70%) et les employés (63%). Le vote NON n’est pas seulement un vote de gauche, mais la gauche est majoritaire dans le NON ; le non de gauche pèse 57% du total des NON.
Le NON de gauche est-il européen ? L’enquête révèle une grande inquiétude vis-à-vis de la construction européenne des électeurs ayant voté NON (67%). Toutefois 10% seulement des NON se déclarent hostiles à la construction européenne et se recrutent essentiellement dans l’extrême droite. La volonté de renégocier le traité est très forte parmi les votants OUI (67%), les NON (66%) et le NON de gauche (70%) et peut laisser penser que le NON de gauche est européen. Néanmoins aucune question ne permet d’apporter une réponse précise à cette question. Rien ne dit que les Français veulent plus d’Europe.
Le vote du 29 mai est un vote de classe, mais il faut d’une part nuancer cette affirmation par d’autres critères, comme l’âge et l’insertion sociale (les personnes disposant du niveau de revenu le plus bas vote moins NON que celles qui ont un niveau de revenu intermédiaire), et d’autre part dire que le NON est majoritaire dans toutes les catégories sauf les chefs d’entreprise et les professions libérales (45%), les BAC+2 et plus (44%), les retraités (47%).
Par rapport à Maastricht, la victoire du NON est due au basculement de l’électorat du PS du OUI au NON. Ce basculement est particulièrement fort dans les territoires marqués par la désindustrialisation, les délocalisations et le chômage. A l’inverse les centres des très grandes villes votent OUI.
La renégociation du traité est souhaitée par tous (61% des votants contre 35%), sauf par l’électorat du Front national. Ce souhait est aussi fort à gauche (68%) qu’à droite (69%).
Les partisans d’une renégociation en attendent des évolutions significatives et positives (74%). Cette attente est très forte à gauche (71%) et encore plus à droite (79%) et faible à l’extrême droite (43% pour le FN). Il y a deux demandes relatives à la renégociation : plus de social (50%) et plus de libertés des Etats membres pour décider leurs politiques nationales (48%). Les électeurs qui souhaitent une renégociation ne veulent donc pas plus d’Europe.
Il y a une inquiétude face à l’élargissement, et une hostilité à l’entrée de la Turquie. Les votants favorables ou hostiles à l’entrée de la Bulgarie sont 49% et 44%, Roumanie : 45%-48%, Ukraine : 43%-49%, Turquie : 28%-66%. Les plus hostiles à l’entrée de la Turquie sont les plus de 50 ans (75%), les ouvriers (71%), les salariés (71%).
Le vote du 29 mai est un vote idéologique. Malgré la complexité et l’aridité du sujet, la campagne et le vote lui-même manifestent un regain d’intérêt et un retour à la politique. Pour la deuxième fois depuis 50 ans, mais plus que pour Maastricht, la question de l’Union européenne a été au cœur du débat politique en France. Mais l’ampleur de ce regain d’intérêt est limitée et ce regain donc probablement fragile. Le NON est composite. Le NON de gauche ne l’est pas, mais il représente un petit tiers des votants.
La classe politique veut oublier le vote du 29 mai. La stupeur passée, elle fait tout pour le contourner : le peuple n’a pas compris, dit-elle. L’Europe a quitté le devant de la scène politique et médiatique dès le 30 mai. En France, tous les partis politiques y compris ceux qui ont fait campagne pour le NON concentrent leur réflexion et action sur l’élection présidentielle de 2007.
Les questions principales
Des questions ont été posées durant la campagne référendaire qui sont autant de priorités et d’objectifs pour les réflexions et actions futures. Elles permettent d’aborder à la fois la communauté et l’idée, à savoir la démocratie et la justice.
I. La démocratie : démocratisation bricolée et remise en cause
Depuis 50 ans la construction européenne a été réalisée à l’écart des peuples et des citoyens. Gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple, la démocratie suppose que la « cité » soit donnée. C’est bien cela que l’Union européenne a fait disparaître à la fois par la dévaluation de l’espace national et par son incapacité à créer un espace européen. La collectivité européenne n’a pas de consistance propre : elle est traversée par les intérêts, influencée par les lobbies et menacée par les communautarismes et populismes. Elle est plus un lieu d’affrontement que de solidarité. En termes modernes, cette « cité » qu’il faut construire est d’abord un espace public à l’échelle de l’Union européenne, un espace où se développent liens et luttes, réflexions et actions collectives.
Dans cet espace public les Européens peuvent débattre des questions de la politique et de la démocratie.
A défaut d’un peuple européen (dêmos) quel est le sujet de la politique ? Qui est souverain ? Sur quoi se fonde la légitimité ?
Quel est l’art de gouverner ? Quel est le bon gouvernement ? Comment s’exerce la souveraineté ? Quels sont les conditions d’un transfert, d’un partage de la souveraineté ? Quelles sont les compétences de l’Union et des Etats-membres ?
On trouve ici les questions institutionnelles et les principes démocratiques : séparation et contrôle des pouvoirs, principe de responsabilité. Ces questions se posent dans une Union élargie à 25 et plus donc dans des termes différents. Deux approches sont possibles qui ne sont pas incompatibles : le « bricolage » des institutions actuelles (leur démocratisation progressive) et la remise en cause de la cohérence idéologique voulue par les fondateurs de l’Europe.
Enfin l’Union européenne actuelle se présente comme « apolitique ». L’alternative politique y est absente. En fait l’UE dissout la politique en transformant toute question politique en problème technique. Le dogme néolibéral qu’elle pose comme Loi, les prescriptions que contiennent ce dogme contiennent « le tout » de la politique et ne laissent qu’un résidu au débat et à la décision. Une fois admis les hypothèses et les présupposés, il n’y a plus qu’une variété de solutions techniques voisines. Il s’agit bien de réunir les conditions d’un retour de la politique. La communauté invente et construit son espace public, les pouvoirs légitimes, l’exercice démocratique. Mais c’est aussi une communauté qui retrouve la « chose politique », rencontre une idée - la justice - et les alternatives qui l’incarnent et se libère du cadre du dogme et des prescriptions cadenassées.
II. Les droits individuels et collectifs
La critique de la Charte des droits fondamentaux peut être résumée ainsi :
elle ne reconnaît pas certains droits essentiels ;
elle contient de nombreux principes qui ne sont pas des droits et comme tels ne sont pas justiciables (invocables devant le juge) ;
elle est limitée premièrement par la mise en œuvre du droit de l’Union et par ses compétences, deuxièmement par le droit et les pratiques des Etats membres, troisièmement par des textes d’interprétation ;
elle déconstruit l’universalité des droits en s’écartant de la notion d’être humain universel, en introduisant des catégories et en mettant sur le même plan l’être humain et, par exemple, les médias ou les entreprises.
La Charte est en recul par rapport aux autres textes relatifs aux droits comme la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ou la convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950. Faut-il partir de la Charte pour l’améliorer ou convient-il de faire appliquer les textes existants ?
S’agissant des droits une autre question se pose. Le droit naturel est au fondement du libéralisme. En rupture avec la Loi religieuse et les devoirs qu’elle impose aux créatures de Dieu, il trouve ses origines chez Machiavel et Hobbes. Le droit de sauvegarde de la vie est le premier pas qui conduit aux droits de l’homme. La mort - ou la conservation de la vie -, la peur de la mort violente considérée comme la passion la plus violente prend la place du but (telos) au cœur du droit naturel. Le droit de conservation de soi enracine la notion d’égalité politique.
Le droit naturel se fonde sur un état de nature qui précède l’état civil. Etalon de mesure universel, il est essentiellement une doctrine des droits individuels. La société n’existe qu’en fonction de l’intérêt particulier de chaque individu. Le droit naturel s’autonomise par rapport au droit positif. Il valorise les droits par rapport aux devoirs et obligations. On parle de droit de l’hommisme et de ses dérives individualistes.
Que faut-il faire des textes relatifs aux droits collectifs ? Quelle place ont-ils par rapport à la Charte ou ses équivalents dans la hiérarchie des normes juridiques ? Quel est l’avenir de la Charte sociale européenne du Conseil de l’Europe du 18 octobre 1961 ? Du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966 ? De la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 décembre 1989 ?
Il convient donc de combler les lacunes du droit, de rétablir l’équilibre entre droits individuels et collectifs, de tenir compte du niveau de développement des Etats membres dans l’établissement de normes progressivement convergentes.
III. La justice contre le néo-libéralisme
Libre-échange : pour un néoprotectionnisme
Le libre-échange est le cœur du néo-libéralisme. On le trouve dans le marché intérieur encore inachevé - le marché des services est encore largement national ou local. On le trouve au plan mondial au travers des accords de commerce. Se réalise à marches forcées le vieux rêve du capital : transformer le travail en une marchandise (un intrant) dans le processus de production et pouvoir l’acheter n’importe où dans le monde au prix le plus bas. Le travail n’est plus vu comme la source de la valeur ajoutée, mais comme une marchandise qui présente les écarts de prix les plus élevés. Un salaire élevé d’ouvrier en Chine est d’environ 50 euros mensuels : 24 fois moins que le salaire minimum moyen de l’Union à 15.
On motive souvent le libre-échange comme « la » condition de la concurrence, elle-même source de l’innovation. C’est inexact. Supposons un Etat totalement protégé par des droits de douane élevés ; si cet Etat accueille, sans restrictions, les investissements étrangers et refuse le monopole, il pratique la concurrence internationale sur son territoire. Mais il la pratique aux conditions qu’il a fixées. Il peut y avoir concurrence internationale sans libre-échange.
Avant tout le libre-échange est le travail marchandise au prix mondial le plus bas. Il est la cause d’une déflation sans précédent des salaires dont on ne perçoit que les premiers effets. Il est cause du chômage de masse. Il est une source première de profit. Il est l’ingrédient principal de la concurrence faussée, ce qui est très différent. Au travers de la métaphore du « plombier polonais », des directives Bolkestein et temps de travail, et des délocalisations, la question du libre-échange a été omniprésente dans la campagne référendaire.
Le néoprotectionnisme doit être au cœur de propositions alternatives pour l’Union européenne. Ce n’est pas une politique du tout ou rien. Il s’agit de rétablir la valeur du travail et les conditions d’une concurrence non faussée par le coût du travail. Le néo-protectionnisme a deux autres avantages : il réduit les gigantesques dégâts écologiques du libre-échange et constitue une source de financement de la solidarité nationale et internationale. Ce néoprotectionnisme doit s’accompagner de la suppression progressive de toute subvention aux exportations, en particulier dans le domaine agricole.
A noter [3] : les Etats membres de l’UE font les deux tiers de leur commerce international entre eux et un tiers avec les Etats extérieurs à l’Union. Hors échanges intracommunautaires, les exportations comme les importations représentent environ 10% du PIB. Hors échanges intracommunautaires, l’UE représente 20% du commerce mondial, à égalité avec les Etats-Unis d’Amérique, le Japon 8% et la Chine 6%.
De nouvelles règles du commerce international
L’Union européenne devrait remettre en cause les principes qui gouvernent le commerce international (OMC). Prenons l’exemple des services.
Le principe de subsidiarité limiterait les accords internationaux aux seuls services qui font l’objet d’échanges internationaux substantiels pour éviter une mondialisation artificielle des échanges.
Le principe de développement humain distinguerait les services qui correspondent à des besoins fondamentaux sociaux et écologiques des autres. Les premiers seraient échangés dans un mode politique et coopératif. Les seconds seraient échangés dans un mode marchand.
Le principe des préférences nationales et internationales permettrait une protection des secteurs naissants et des échanges internationaux dans un mode coopératif et politique.
Le principe de liberté reconnaîtrait le droit des Etats de légiférer sur les services.
Le principe démocratique ferait précéder tout accord majeur d’échange coopératif ou marchand d’une évaluation contradictoire de ses effets sur la pauvreté et les écosystèmes, assurerait un contrôle démocratique et une possibilité de réversibilité.
Des politiques au service de la solidarité actuelle et intergénérationnelle
Les critiques de la campagne ont porté sur l’indépendance de la Banque centrale européenne, l’objectif unique (la stabilité des prix), la financiarisation de l’économie, les politiques monétaires restrictives, la politique de change dictée par les marchés, la concurrence fiscale et sociale entre les Etats membres, et enfin sur les dommages faits à l’environnement et sur le caractère non soutenable du développement actuel.
Pour servir deux buts, le plein emploi et la préservation des écosystèmes, pour donc rééquilibrer marché et solidarité, les changements suivants s’imposent.
Il faut mettre fin à l’indépendance de la BCE qui doit être soumise au pouvoir des instances élues ou représentatives, comme le Parlement et le Conseil, et exécuter leurs décisions de politique monétaire et de change.
Les gouvernements des pays de l’Union doivent définir une politique de change commune que le traité actuel autorise et non pas, comme aujourd’hui, renoncer à leur pouvoir pour le donner entièrement à la BCE. Cette politique doit être favorable au plein emploi dans l’Union. Elle doit avoir pour but la coopération monétaire avec les autres régions du monde afin de réduire la possibilité des crises financières et d’éviter les dévaluations compétitives.
Redonner leur rôle aux politiques budgétaires nationales est également une nécessité, pour deux raisons : compenser le biais dépressif de la politique monétaire et prendre en compte l’hétérogénéité des économies nationales, ce que la politique monétaire unique ne peut pas faire.
De même, une politique budgétaire communautaire plus ambitieuse s’impose pour mutualiser les dépenses d’infrastructures et accroître les transferts entre régions et pays membres. Ce qui nécessite une hausse très sensible du budget européen aujourd’hui limité à 1,24% du Revenu national brut de l’Union, soit 1,27% de son Produit intérieur brut (PIB). Porter le budget de l’Union européenne à 5% du PIB en dix ans constitue une cible raisonnable.
Lever l’interdiction d’emprunt des Etats et de l’Union européenne auprès de la BCE pour financer le secteur non marchand, les services publics, les projets prioritaires européens, et la préservation des écosystèmes.
Remplacer le Pacte de stabilité et de croissance par la coopération et la décision politiques au service du plein emploi.
Obtenir à une convergence fiscale sur le revenu du capital, voire sur l’impôt sur le revenu, qui conjure l’évasion fiscale et préserve les capacités de redistribution et d’intervention des Etats membres. Par exemple, s’agissant de l’impôt sur les sociétés, le dumping fiscal est à l’oeuvre dès que le taux d’imposition des grands pays dépasse de 6% celui des petits : il est communément de 20% actuellement. Il s’agit d’une convergence fiscale vers le haut que nécessite d’ailleurs la mauvaise situation des finances publiques de la plupart des Etats membres et la nécessaire convergence sociale.
Contenir l’emprise du marché : autoriser les aides de l’Etat au secteur non marchand, aux services publics et aux projets prioritaires en les soustrayant aux règles de la concurrence et aux principes de gestion des entreprises privées. Cela consisterait notamment à définir un mode coopératif et des critères d’efficacité et d’utilité sociales et écologiques. Cela impliquerait un moratoire sur les privatisations et un retour sur certaines d’entre elles si la nécessaire évaluation démocratique y conduit.
Desserrer la concurrence sociale entre les Etats membres. Les droits individuels et collectifs doivent être justiciables pour être effectifs et non formels.
L’action de l’Union sur les normes minimales au travail est très limitée. L’intégration européenne se fait selon trois modes : la convergence par un accord politique entre les Etats, l’harmonisation par la loi européenne, la reconnaissance mutuelle ou principe du pays d’origine. Le premier mode doit être privilégié, le troisième refusé. Des normes minimales croissantes et convergentes doivent être développées.
L’encadrement et l’organisation des relations de travail (droit du travail, conventions collectives, etc.) restent dans une très large mesure le domaine de compétence et d’action des Etats membres.
Le caractère global ou multinational des entreprises, la notion d’entreprise étendue [4], le détachement fréquent des travailleurs à l’étranger doivent se traduire par des droits transnationaux nouveaux pour les salariés.
Améliorer l’environnement et préserver la capacité des générations futures de subvenir à leurs besoins. L’Union européenne met en place des réglementations environnementales relativement contraignantes et a simultanément un mode de développement qui les contredit. Les propositions alternatives ont deux dimensions : la remise en cause du mode de développement pour qu’il soit économe et soutenable et la régulation. Les domaines sur lesquels portent la réflexion et l’action sont connus : changement climatique ; pollution de l’air et des sols ; pollution chimique ; OGM ; protection de la nature et de la biodiversité.
IV. Un élargissement non solidaire
Depuis le traité de Maastricht et la création de la monnaie unique, le cinquième élargissement, le 1er mai 2004, est sans conteste l’événement le plus important de l’Union européenne. Huit pays d’Europe centrale et orientale (PECO), Chypre et Malte sont membres de l’UE. La population de l’Union est passée de 377 à 452 millions d’habitants (+20%), la superficie de 3,2 à 3,9 millions de km2 (+25%). Le Produit intérieur brut (PIB) a cru de 5%. Les Dix réunis ont un PIB de l’ordre de celui des Pays-Bas. Cet élargissement soulève des questions multiples économiques, sociales, écologiques, politiques. L’accent est mis ici sur l’un de ces multiples aspects : la solidarité manifestée par l’Union à quinze (UE15) vis-à-vis des PECO.
L’écart de développement entre les PECO et l’UE15 est sans précédent. Il est environ double de celui qui existait entre l’Espagne, l’Irlande, le Portugal et la Grèce et le reste de l’Union lors leur adhésion à la Communauté économique européenne (CEE). Plus de 90% des habitants des PECO sont en dessous du seuil de pauvreté de l’Union (10000 $ par an) [5]. Le revenu médian [6] polonais est 5 fois inférieur au revenu médian allemand. Dans l’Union européenne à 25, l’écart qui sépare les 10% les plus riches des 10% les plus pauvres est supérieur d’un tiers à ce qu’il est aux Etats-Unis d’Amérique. Le salaire moyen français est 4 fois supérieur au salaire moyen polonais. Le rapport est de 5 et 7 respectivement en Hongrie et Slovaquie. Les écarts entre les salaires minimum [7] sont plus grands encore. Le salaire minimum letton (116 euros) est 13 fois inférieur à celui du Luxembourg (1467 euros). Le salaire minimum des PECO s’échelonne entre 100 et 200 euros par mois. Le salaire minimum en Bulgarie dont l’adhésion à l’Union est prévue en 2007 est de 75 euros mensuels.
Entre 1898 et 1999 l’UE conclut avec les PECO des accords d’association qui ont deux buts : créer une zone de libre-échange et instituer un dialogue politique. Le volet financier de ces accords est de 680 millions d’euros par an, soit l’équivalent de 2 euros par an et par habitant de l’Union à 15 (UE15) ce qui est dérisoire. Lors des conseils européens de Copenhague de juin 1993 et d’Helsinki de décembre 1999 sont respectivement fixés les principes et conditions de l’adhésion, puis ouvertes les négociations.
Ces négociations vont se dérouler à partir de 2000 et aboutir à l’adhésion le 1er mai 2004. Elles sont fondées sur la mise en œuvre de l’acquis communautaire [8], l’absence de dérogations définitives par rapport à cet acquis et l’aménagement de périodes de transition pour le mettre en oeuvre. Les négociations sont accompagnées d’un « partenariat pour l’adhésion ». C’est la dimension « aide » de ces négociations qui doit permettre aux PECO de s’adapter aux procédures et politiques de l’UE. Le montant des aides est de 3,3 milliards d’euros par an, soit l’équivalent de 10 euros par an et par habitant de l’UE15, ce qui reste dérisoire compte tenu de la mutation à accomplir.
Le résultat des négociations comporte notamment les dispositions suivantes :
une limitation de la circulation des personnes pendant 7 à 9 ans ;
un maintien du contrôle aux frontières entre les PECO et l’UE15 (les PECO ne font pas partie de la zone Schengen) ;
des dérogations aux normes environnementales pendant 10 ans ;
un changement des règles de la Politique agricole commune : à conditions égales, les paysans des PECO reçoivent 25% des aides reçues par les paysans de l’UE15 en 2004, puis 40% en 2007 ; il faut attendre 2013 pour qu’ils perçoivent autant ;
les fonds structurels qui aident notamment les régions les plus pauvres de l’Union sont plafonnées pour en limiter les montants versés aux PECO.
Il en résulte que les crédits d’engagement de l’UE en faveur des PECO sont de 9,9 milliards d’euros en 2004, 12,6 en 2005 et 14,9 en 2006. Pour cette même période (2004 à 2006) les transferts nets [9] de l’Union vers les PECO sont d’environ 5 milliards d’euros par an, soit l’équivalent de 14 euros par an et par habitant de l’UE15. Tel est donc l’effort de solidarité de l’UE15 pour les PECO. En prenant l’hypothèse d’une croissance du PIB des PECO de 5% par an et une contribution nette de 2% du PIB venant de l’Union, la contribution nette de l’UE aux PECO devrait être d’environ 12 milliards d’euros par an sur la période 2007-2013. C’est à cette aune qu’il faudra juger le prochain budget de l’Union qui est actuellement en cours de négociation.
S’agissant de l’élargissement, la première proposition alternative est bien d’augmenter massivement l’effort de solidarité des Quinze pour les PECO afin que s’engage un processus rapide de convergence. Ce processus n’est pas garanti. Loin s’en faut. La Grèce est un contre-exemple. Les considérations qui suivent montrent combien cette solidarité jusqu’à présent absente est nécessaire.
Quelques jours après le 1er mai 2004, jour de leur entrée dans l’Union européenne, la Commission européenne a lancé la procédure de déficit excessif contre six des dix nouveaux Etats membres de l’Union : Chypre, Hongrie, Malte, Pologne, République tchèque et Slovaquie. Ces six Etats ne respectent pas le Pacte de stabilité et de croissance. Pour ce qui est des quatre PECO concernés, en 2003, le déficit de leur budget public est supérieur à la limite de 3% du produit intérieur brut (PIB) : Hongrie - 5,9%, Pologne - 4,1%, République tchèque - 12,9%, Slovaquie - 3,6%. La dette publique de la Hongrie jouxte la limite de 60% du PIB à 59,1%.
Le « programme de convergence » d’une durée de quatre ans (2003-2007) que ces pays remettent alors à la Commission européenne montrent que la Pologne et la Slovaquie prévoient de satisfaire les critères du Pacte en 2007 et la Hongrie et la République tchèque pas avant 2008. Le tout est bâti dans l’hypothèse d’une forte croissance. Les dispositions des programmes de convergence contiennent tous :
une diminution des transferts vers les ménages (par exemple : -1,3% du PIB en Slovaquie et - 4,4% du PIB en Pologne) ;
un accroissement de la taxation des ménages par une augmentation de la TVA ;
une diminution de l’impôt des entreprises, par exemple, de 27% à 19% en Pologne alors que la moyenne de l’UE15 est à 29% ;
une diminution du poids de l’Etat : les dépenses publiques doivent passer, par exemple, de 55% à 50,6% du PIB en Pologne.
L’adhésion à l’Union européenne des PECO, pays en transition vers l’économie de marché a un coût important. Tout d’abord il y a la mise en œuvre de l’acquis communautaire. Ensuite il y a une perte de ressources : les droits de douane perçus par les PECO sur les importations venant des Quinze ont disparu. De plus la contribution des PECO au budget de l’Union a trois composantes : pourcentage du revenu national brut (RNB) et de la TVA et attribution à l’UE des droits de douane perçus sur les biens et services importés de l’extérieur de l’UE. Cette contribution est fondée sur des critères objectifs directement mesurables : elle est certaine. A contrario, la contribution de l’Union aux PECO est plus problématique, plus incertaine. Elle suppose la bonne qualité des institutions et de l’administration de ces pays. Il en est ainsi des fonds de la Politique agricole commune (PAC) et des fonds structurels dont, par exemple, l’attribution dépend de la qualité des projets soumis à la Commission.
Les études gouvernementales et autres s’accordent sur un point important : l’Union va coûter, et non rapporter aux PECO, dans la période initiale, entre 2004 et 2007. Deux exemples... L’étude de G. Kopits et I. Székely de 2002 considère tous les effets directs et indirects et chiffre l’impact négatif budgétaire net de l’adhésion à 3 à 4,75% du PIB pour la République tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie. Les gouvernements slovaque, slovène et tchèque avancent un coût de 3 à 5% du PIB pour la période 2004-2007.
V. L’Europe politique introuvable [10]
Europe politique ?
Le terme même « Europe politique » ou même « Union politique » est ambigu. Il renvoie au débat sur la nature de la construction européenne. L’Union européenne doit-elle se confiner à des domaines techniques de nature purement économique ou au contraire développer des ambitions politiques ?
Les questions économiques sont politiques : il n’y a pas de frontières entre sphère technico-économique et sphère politique. L’énergie, la politique agricole commune, les fonds structurels sont des questions politiques. Il en est de même de la construction du marché intérieur, de l’ouverture au marché mondial, de la concurrence, de la monnaie et du budget. L’institution de la compétition entre les Etats membres en matière sociale, fiscale et environnementale est un choix politique. L’ensemble des politiques de l’Union européenne dessine une politique d’ensemble. L’économie est inséparable de la politique.
La construction européenne est inachevée. Chaque étape de cette construction crée un déséquilibre et motive une extension de fait des compétences de l’Union. La politique commerciale commune, compétence exclusive de l’UE, s’inscrit dans la politique étrangère et en demande le renforcement. La technologie renvoie au militaire. La monnaie commune appelle ses compléments : le budget, la fiscalité, le gouvernement économique. Ces déséquilibres s’accompagnent d’une institutionnalisation. Trois domaines se distinguent : la citoyenneté européenne ; l’espace de liberté, de sécurité et de justice ; la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) sur laquelle il convient de se concentrer tant elle est politique. La question qu’on peut alors se poser est la suivante : l’Union européenne peut-elle mobiliser des ressources humaines et matérielles au service d’ambitions internationales ?
Depuis le traité de Maastricht (1992) qui institue une politique étrangère, l’actualité a montré que l’UE est un nain sur la scène internationale. Le seconde guerre d’Irak a « révélé » l’état de désunion de l’Union sur le point cardinal de toute politique étrangère : la relation avec les Etats-Unis d’Amérique. Il n’y a pas de véritable stratégie globale de politique étrangère et de sécurité commune qui suppose notamment des valeurs communes et une vision partagée.
Des valeurs au rabais et non partagées par les peuples
Une façon de définir l’Union européenne par des valeurs est de tenter de répondre à la question : « Qu’est-ce qu’être Européen ? »
L’Europe continent ou Europe géographique est mal délimitée et échappe à une définition stable. Ces frontières de l’est sont floues et modifiées par les aléas politiques.
L’Europe civilisation appartient à un passé conquérant, colonialiste et élitiste. Même la dimension culturelle de l’Europe échappe : « Dire cofondation, c’est inviter à repenser toue les composantes de notre complexe héritage européen, selon leur capacité de survie (...) Je retrouve la formule de Habermas lorsqu’il disait que le projet - programme de la rationalité (l’Aufklärung) - n’est pas épuisé. Mais je le dirais de tous les héritages ; grec et romain, juif et chrétien, médiéval et Renaissance, les Lumières, le romantisme du XIXe siècle. [11] » Il conviendrait d’y ajouter l’héritage arabe...
L’Europe organisation, autrement dit l’Union européenne, nous propose le marché et l’euro. Elle se définit par l’acquis communautaire (le droit communautaire) qu’elle impose aux pays entrants. Ce faisant la partie s’impose au tout. Elle mesure chichement sa solidarité (fonds structurels). Elle fait un retour sur son identité quand elle définit les critères d’adhésion à l’Union : « L’adhésion requiert de la part du candidat qu’il ait des institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection, l’existence d’une économie de marché viable ainsi que la capacité de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l’intérieur de l’Union. L’adhésion présuppose la capacité du pays candidat à en assumer les obligations, et notamment à souscrire aux objectifs de l’Union politique, économique et monétaire. [12] »
En fait cette définition au rabais des valeurs ne rend pas justice au meilleur de la tradition européenne : reconnaissance institutionnelle des droits sociaux comme droits fondamentaux ; sécularisation et laïcité ; démocratie conflictuelle ; démocratie expansive ; invention démocratique. Elle n’ouvre pas de nouveaux champs à la politique. Sans valeurs qui mobilisent à l’échelle de l’Union européenne, les peuples ne sont pas des sujets politiques. L’Europe n’existe donc pas comme sujet politique. La volonté politique non plus.
Des visions concurrentes [13]
Selon Robert Kagan [14] l’Union européenne vit dans l’illusion de l’au-delà de l’histoire, de l’avènement du droit et de la négociation : le soft power (le pouvoir doux qui ne recourt pas à la force). C’est parce qu’elle est faible qu’elle est idéaliste. Pour les Etats-Unis d’Amérique, embourbés dans l’histoire, seul le hard power est possible. Le droit est certes la fin, mais la force est le moyen. Cette force pour être crédible doit se montrer. Les Etats-Unis sont « l’Empire bienveillant [15] », « la nation indispensable [16] » ; ils ont une destinée manifeste. Ils portent selon le mot de Kipling « le fardeau de l’homme blanc » et permettent aux Européens d’emprunter le chemin de l’idéalisme. « Ni les Français, ni les autres Européens, ni même les Russes ne sont prêts à payer le prix d’un monde authentiquement multipolaire (...) Ils craignent à juste titre les conséquences géopolitiques de la destruction de l’hégémonie américaine. [17] » La vision de Robert Kagan n’est que l’une de celles qui se dispute Washington [18]. Elle a fait des émules notamment dans l’Union européenne qui voient les Etats-Unis d’Amérique « comme le champion d’un droit universel dont ils sont à la fois les énonciateurs, les interprètes et les exécutants, et qui donc, puisqu’il est incarné par eux, ne saurait leur être opposé. [19] »
Au sein de la gauche américaine certains s’écartent à la fois de la vision de Robert Kagan et de la guerre préventive et de celle des pacifistes [20]. Face aux menaces ils refusent la guerre préventive, mais ne refusent pas la guerre. Ils théorisent la guerre juste ou injuste autour de trois dimensions :
le justice du recours à la guerre (jus ad bellum) fondée sur l’intention juste (épuisement des moyens pacifiques) et sur la justice de la cause (la guerre comme réponse à l’agression) ;
la justice des moyens (jus in bello) employés dans la guerre qui repose sur une double contrainte : la proportionnalité de la riposte et l’immunité des non combattants ;
la justice des résultats (jus post bellum) : le but de la guerre n’est pas d’exterminer l’ennemi mais de faire cesser l’agression et la menace.
On peut dire que cette vision impose des restrictions et des conditions d’usage de la force.
Défendue un moment par la France, la vision d’une Europe puissance a pour but l’autonomie de la politique étrangère et militaire européenne notamment vis-à-vis des Etats-Unis d’Amérique. Elle renvoie à une vision multipolaire du monde [21]. Elle est fondée sur le droit international, la gouvernance mondiale et le multilatéralisme. Elle suppose un équilibre des puissances qui n’existe pas encore et un système d’alliances qui peut mettre à mal la cohérence de l’Union européenne. Une alliance avec la Chine renverrait l’Inde et la Russie dans le camp des Etats-Unis. Une alliance durable et active avec la Russie susciterait plus que la réserve des Pays de l’Europe centrale et orientale (PECO). L’Europe puissance ne récuse pas dans son principe l’usage de la force qui serait alors fondée sur une triple entente - Royaume-Uni, Allemagne et France, seules puissances militaires. Cette triple entente est pour le moins problématique. L’idée d’Europe puissance est en perte de vitesse. Seule la France en parle, mais... de moins en moins.
Face aux menaces terroristes a été avancée l’idée d’une police internationale [22] fondée sur la distinction entre la guerre qui oppose deux adversaires d’égal statut (symétrie) et les opérations de police où il s’agit de réprimer des crimes contre la collectivité dans un cadre asymétrique : ces crimes ne sont pas le fait d’un Etat. Cette vision tire parti du déficit chronique d’efficacité de l’ONU, des critiques formulées sur le Conseil de sécurité, instance où s’exprime le plus souvent la collusion des intérêts des Etats membres permanents. Elle prend acte aussi des limites du droit pénal international : les Etats-Unis s’en exonèrent. Mais une police internationale n’est qu’un instrument au service d’une politique plus générale qui n’est pas définie et est hautement problématique. Une police internationale pose un problème aigu de contrôle démocratique.
Le débat sur l’Europe politique est d’une singulière complexité. Il postule des valeurs communes et partagées et renvoie à la dialectique entre la justice et la force. Il questionne la relation avec les Etats-Unis, la culture de la dépendance. Il oblige à revisiter la nation même de puissance. Y a-t-il un autre régime de puissance possible qui assure la maîtrise de notre destin collectif ? Les conditions historiques sont-elles réunis pour qu’un tel régime advienne ?
VI. Crise ou rupture ?
S’agit-il d’une crise comme les autres ou de la rupture d’une trajectoire perverse vieille de 50 ans ? La réponse à cette question dépend de la capacité des Européens à créer un espace public européen. Et aussi de la qualité des analyses critiques, des propositions alternatives et de leur traduction en luttes sociales, environnementales et politiques. Il s’agit de savoir si les Européens vivent la période actuelle comme un commencement où est progressivement scellée la rencontre entre une communauté qui s’invente et une idée - la justice - qui lui donne un sens.
« Il faut le répéter : ce n’est pas par hasard que l’Europe est le lieu de cette nouvelle donne. C’est elle qui a produit la chose politique, c’est elle qui l’a désagrégée, c’est elle qui peut inventer l’autre "chose", l’autre "res publica". Et cela dépend, bien évidemment, d’un autre ordre que de l’ordre politique.
N’ayons pas peur des grands mots, car leur vide même ou leur creux signale l’ampleur de la tâche : c’est une affaire de civilisation, de pensée, de métaphysique ; on disait, naguère, de révolution. Dans tous les cas, cela relève de ce qui ne se décide pas, ni ne s’institue. Cela ne fait ni manifeste, ni parti, ni mouvement.
Cela relève de ce qui vient lorsqu’on sait l’accueillir mais qui arrive sans qu’on le voie venir. C’est peut-être déjà arrivé, en fait. On pourrait dire que ce n’est pas "constituant", mais pré- ou ante-constituant, archi-originaire ou encore archi-désirant.
Et s’il n’est plus possible de le penser ni comme révolutionnaire ni comme évolutionniste, soyons au moins certains que c’est, que se sera, bouleversant. [23] »
Alain Lecourieux
Notes :
[1] Les chiffres cités proviennent de l’enquête réalisée par le CSA auprès de plus de 5000 personnes. Les autres enquêtes donnent des résultats très voisins.
[2] L’expression « NON de gauche » veut dire l’ensemble des votes NON d’électeurs qui ont voté pour l’un des partis dit de gauche aux précédentes élections. Il s’agit donc d’une facilité de langage qui ne suppose pas l’existence d’un OUI qui pourrait se réclamer des valeurs de la gauche.
[3] Chiffres de 2003.
[4] L’entreprise est vue comme un réseau qui comprend l’entreprise elle-même, mais aussi ses fournisseurs, sous-traitants, partenaires et clients.
[5] Compte tenu du marché intérieur à 25 et de ce qui est aussi en cause - la concurrence sur le coût du travail - les chiffres sont donnés en valeur réelle au taux de change et non en parité de pouvoir d’achat. Les écarts en parité de pouvoir d’achat sont environ moitié. Il faut noter qu’il y a une convergence rapide entre les prix dans l’UE15 et les prix dans les PECO.
[6] Le revenu médian sépare la moitié la plus riche de la moitié la plus pauvre.
[7] Là où existe un salaire minimum.
[8] Mentionné dans le traité sur l’Union européenne (TUE) ou traité de Maastricht (1992), l’acquis communautaire désigne le corpus juridique et législatif de la Communauté européenne : droits, obligations, principes, réglementations, traités, législation, décisions et arrêts. Dans une acception large, l’acquis communautaire inclut les traités et accords internationaux.
[9] Le transfert net mesure la différence entre ce que reçoit l’Union et ce qu’elle donne à un Etat membre (ou l’inverse). C’est une notion très controversée notamment parce qu’elle est difficile à mesurer et qu’elle sujette à de multiples interprétations.
[10] Il s’agit de planter le décor pour un débat qui n’a pas encore eu lieu dans Attac.
[11] Paul Ricoeur
[12] Déclaration faite à l’issue du Conseil européen de Copenhague du 23 juin 1993. Les critères ainsi définis sont appelés critères de Copenhague.
[13] Seules quelques-unes des visions concurrentes sont mentionnées.
[14] Dans « Power and Weakness » (Puissance et faiblesse), Octobre 2002. Robert Kagan est membre d’un groupe de pression (Carnegie Endowment of International Peace) et éditorialiste notamment au Washington Post.
[15] The Benevolent Empire (L’Empire bienveillant), Foreign Policy, été 1998.
[16] Expression employée par Madeleine Albright, alors secrétaire d’Etat.
[17] L’Empire bienveillant, ibid.
[18] Robert Kagan est hégémoniste. Les autres courants influents sont les néo-conservateurs (Paul Wolfowitz), les isolationnistes (Jessse Helms), les réalistes (Henry Kissinger), les internationalistes (Joseph Nye).
[19] Washington et le monde, février 2003, Pierre Hassner et Justin Vaïsse, CERI Autrement.
[20] C’est le cas de Michael Walzer dans « Just and Unjust Wars » (Guerres justes et injustes).
[21] La multipolarité ne va pas de soi. Il faut remonter au XIXe siècle pour trouver un réel système multipolaire. « La civilisation du XIXe siècle reposait sur quatre institutions (...) l’équilibre des Grandes Puissances, (...) l’étalon or, (...) le marché autorégulateur, (...) l’Etat libéral. » - La Grande Transformation - Karl Polanyi.
[22] Par Luigi Ferrajoli, juriste italien, notamment.
[23] L’impossible acte constituant, Jean-Luc Nancy, Le Monde, 28 juin 2005.
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